Serait-ce la fin du tourisme de masse ?

Devons-nous apprendre à voyager différemment ? Nombreux sont ceux à visiter un pays car « il est tendance » et à consommer sur place de manière excessive. Avec l’avènement des réseaux sociaux et notamment d’Instagram, nous sommes davantage motivés à réussir une photo sur une plage aux belles couleurs qu’à vivre un moment unique au bout du monde. Ce tourisme dit de masse a été dénoncé dans une longue tribune signée par Rodolphe Christin – sociologue – et Marie Negré Desurmont.

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Le tourisme et son évolution

Au départ, le tourisme était une aubaine pour chaque individu pour aller à la rencontre d’une autre culture durant ses vacances. Avec l’augmentation des congés payés, l’avènement des compagnies low cost et les nouveaux acteurs du tourisme, les foyers peuvent se permettre de voyager à l’autre bout du monde pour quelques centaines d’euros.. Au départ cette démocratisation du voyage devait profiter à des baroudeurs aux petits revenus, mais selon plusieurs études cette capitalisation du tourisme profite davantage aux personnes les plus riches (86% des foyers gagnants plus de 3000 euros par moi ont pu quitter leur domicile pour partir en vacances contre 40% des personnes ayant un revenu en dessous de 1200 euros).

Voyager pour le montrer

L’autre aspect inquiétant selon les deux signataires de la tribune est la « culture du like ». Aujourd’hui, de nombreux vacanciers communiquent à tous leur destination, leurs hobbies durant leur séjour à travers des photos, statuts et vidéos postés sur les réseaux sociaux. Sur Instagram, il suffit de rechercher des photos à l’aide d’un hashtag lié au voyage pour voir que les internautes vont de plus en plus loin dans l’exposition de leurs vacances. Ces voyageurs ultra-connectés ne s’arrêtent pas à diverses photos postées, mais documentent leur journée à l’aide de stories (photo ou vidéo disponible durant 24 heures) montrant :
• leur repas
• leur tenue du jour
• un paysage
• un monument
• un loisir

Cette exposition incessante sur les réseaux sociaux montre que les vacanciers ont besoin de montrer qu’ils sont libres durant leur séjour avant de retourner travailler pour gagner assez d’argent afin de payer leur prochain voyage. Ils donnent l’impression d’avoir besoin de se mettre au vert, de se couper de leur vie quotidienne tout en restant ultra-connectés à leurs réseaux sociaux.

Le tourisme est un produit

Aujourd’hui, le tourisme est un produit et personne ne s’en cache. Les différentes agences de voyage l’admettent face à tous : un voyage est un produit avec des prestations. Dorénavant le tourisme se consomme comme nous achetons des vêtements ou encore des meubles. Avec ces voyages organisés, notre planète bleue s’organise autour du capitalisme avec la loi de l’offre et de la demande. Finalement, lorsque nous partons en vacances, nous restons enfermés dans notre zone de confort que nous connaissons sur le bout des doigts alors que nous faisons plusieurs heures d’avion pour parcourir le monde. Souvent, certains globe-trotteurs visitent plusieurs pays en un minimum de jours alors ils ne prennent pas le temps de s’imprégner d’une culture, de rencontrer les locaux au profit de visites express de monuments d’où ils posteront la meilleure photo pour sur les réseaux sociaux.

Les effets négatifs du tourisme de masse

L’heure où les vacanciers géraient leur temps libre comme ils le souhaitaient semble être révolue. En effet, l’augmentation des voyages organisés où le groupe vit une journée quasi similaire en faisant les mêmes activités et vivant les mêmes soirées donne lieu à des vacances communes sans expérience notable. De plus, sur le papier, le tourisme a un effet très positif sur l’économie d’une ville ou d’un pays, mais finalement l’argent généré peut également cacher une autre réalité : la pollution. Ce constat est réel dans une ville comme Venise où les touristes ne respectent pas l’environnement donc la ville doit mettre en place de nouvelles mesures pour y remédier (en faisant payer une taxe d’entrée par exemple afin de pouvoir correctement nettoyer la ville) ou en Croatie où les croisières peuvent entraîner des frais liés à la pollution allant jusqu’à 300 milliards d’euros (contre 50 milliards de bénéfice).

De plus, l’économie du tourisme peut avoir un effet négatif sur les locaux. Une ville touristique peut mettre à mal ses propres habitants avec l’augmentation du prix des loyers par exemple ou la multiplication des locations saisonnières avec des applications comme Air bnb. Par exemple, le centre de Paris regorge d’appartements dédiés aux touristes alors les locaux sont repoussés vers d’autres quartiers ou en périphérie. Sans oublier la multiplication des boutiques de souvenirs au détriment des commerces de proximité.

Pour remédier à ce tourisme de masse, il faut s’ouvrir à l’Autre. Pourquoi ne pas abandonner l’idée d’un voyage tout compris dans un club de vacances pour se lancer dans une aventure dans un pays inconnu ?

Photos : f1g.fr, actudici.fr